Caillebotte Martial, où la réhabilitation de la musique du frère de Gustave Caillebotte par le Choeur régional Vittoria d’Île-de-France et Michel Piquemal.
Cette histoire démarre en 2012, sous l’impulsion de Michel Piquemal, directeur artistique du Chœur, qui a fait rééditer et enregistrer les partitions, grâce au concours de la famille Caillebotte et de Benoît Riou.
CAILLEBOTTE : UNE ILLUSTRE FAMILLE
Il était une fois chez les Caillebotte, Alfred, Gustave et Martial, le premier officie, le second peint et le dernier joue. Tous trois forment une fratrie au destin artistique et spirituel glorieux.
Martial Caillebotte père (1799-1874) vint se marier et s’installer à Paris, prospérer au sein d’un commerce de tissus, faire fortune et même devenir juge au Tribunal de Commerce. Il eut quatre fils dont trois devinrent des personnalités de cette fin des années 1800 : Alfred (1834-1896), Gustave (1848-1894), René (1851-1876), Martial (1853-1910).
Martial Caillebotte est né le 7 avril 1853 au 160, rue du Faubourg Saint-Denis à Paris. Il passa une partie de son enfance entre l’hôtel particulier de la rue de Lisbonne, que son père fit construire, et la propriété d’Yerres, dans l’Essonne, acquise en 1860, aujourd’hui restaurée et ouverte au public comme « la Propriété Caillebotte ». Le 3 novembre 1873, Martial fut admis au Conservatoire de musique de Paris et eut pour professeurs Antoine Marmontel pour le piano, et Théodore Dubois pour l’harmonie. Il y croisa aussi Debussy.
Le décès de Martial Caillebotte père en décembre 1874 fut un événement déterminant et ses enfants héritèrent d’une fortune considérable qui permit aux frères de s’épanouir dans un environnement sécurisé ou travailler n’est pas nécessaire. Mais cela annonça également de tristes années puisque leur frère René disparut en 1876, puis leur mère Céleste Daufresne, en octobre 1878. Ces circonstances toutefois ont rapproché Gustave et Martial qui vécurent alors ensemble pendant dix ans – au 31 boulevard Haussmann – et partagèrent des passions communes : la philatélie, le yachting et le mécénat artistique. Ces conditions de vie notamment permirent de voir fleurir tout le talent pictural de Gustave, mais aussi la passion pour la musique de Martial. Pendant ce temps, leur demi frère Alfred, né du premier mariage de leur père, fut un des curés les plus en vue de la fin du XIXe siècle à Paris. Il était considéré comme le curé le plus riche de Paris : il consacra son temps et sa fortune aux œuvres catholiques.
Martial se maria en 1887 avec Marie Minoret et eut deux enfants : Jean et Geneviève, seule descendance de cette illustre famille. En photographe amateur, initié par son beau-frère, Martial va prendre des clichés sur les lieux où son frère Gustave a peint ses principaux tableaux. Ses photos conservées par ses descendants seront dévoilés en 2011.
Martial Caillebotte disparait le 16 janvier 1910 à son domicile parisien rue Scribe, n° 9. Lorsqu’on lui demandait sa profession, il répondait volontiers propriétaire et non musicien. En effet, sur le relevé de sa succession, il est reconnu posséder trois boutiques et huit maisons louées par appartements.
Extrait : le frère « oublié » du deuxième disque Martial Caillebotte
CAILLEBOTTE : SA MUSIQUE TRES LIEE A SES FRERES
Sa position sociale et sa discrétion n’ont pas favorisé son renom de musicien. Quelques rares témoignages d’exécutions de ses œuvres existent mais il était visiblement peu soucieux de faire entendre sa musique.
Toutefois la musique de Martial Caillebotte reste intrinsèquement liée à ses deux frères et à la paroisse Notre-Dame de Lorette.
Le Psaume 132 – Ecce quam bonum par exemple est créé lors de l’inauguration de l’orgue de Notre-Dame de Lorette en 1886, dédié
« à mon frère l’Abbé A. Caillebotte, curé de Notre-Dame de Lorette ».
Si Martial a été très lié à son frère Gustave, il l’a donc été aussi à Alfred. Voici, l’extrait d’une annonce du journal « La semaine religieuse de Paris », au sujet de la cérémonie tenue à Notre-Dame de Lorette dans le numéro du 25 décembre 1886 :
« Le lundi 20 décembre, dans l’après-midi, a eu lieu l’inauguration de l’orgue de choeur de la paroisse de Notre-Dame de Lorette. La cérémonie était présidée par l’Abbé Millaut, curé de Saint-Roch. L’orgue sera tenu par M. Théodore Dubois. Dès trois heures, on ne pouvait plus trouver une seule place dans la nef. A trois heures et demi, M. l’Abbé Millault a béni le nouvel instrument (…). On a remarqué surtout un Ecce quam bonum de M. Martial Caillebotte, frère de M. le curé de Notre-Dame de Lorette. Ce morceau de longue haleine, exécuté avec accompagnement de harpes et de violons, a été fort goûté des connaisseurs. »
Le Psaume 132 fut édité en 1887 chez Hartmann, la même année que ses Airs de ballets. Le Psaume 132, également appelé Ecce quam bonum reste l’œuvre la plus emblématique des puissants liens qui unissaient les frères, mettant en scène trois solistes hommes sur des paroles : « Voyez comme il est bon, comme il est doux à des frères d’habiter ensemble (…) car sur les frères unis, c’est là que Yahveh envoie la bénédiction et la vie pour l’éternité ! ».
La paroisse Notre-Dame de Lorette enfin, point central de la famille Caillebotte, où se sont tenues, en 1894, les obsèques de Gustave Caillebotte en présence d’Alfred et Martial portant alors les cordons du poêle du cercueil pour accompagner leur frère dans cet ultime voyage.
CAILLEBOTTE PREMIER DISQUE : LA MESSE SOLENNELLE DE PÂQUES
Martial Caillebotte redécouvert grâce à la passion pour la musique française de Michel Piquemal apparaît aujourd’hui pour ce qu’il est : un compositeur de talent, et non plus comme le frère méconnu de Gustave, figure reconnue de l’Impressionnisme et mécène de Monet, Renoir et Degas.
Récompensé des ffff de Télérama, de 4 Diapasons – et salué par toute la presse musicale :
« Une découverte à ne manquer sous aucun prétexte. » Falcinelli.org (janv. 2013)
« Une musique aux élans généreux, à l’humanité certaine. À découvrir. » Valeurs actuelles (janv. 2013)
« Michel Piquemal est un de ces rares chefs du paysage musical français à défendre notre patrimoine avec autant d’ardeur. » Tutti Magazine (janv. 2013)
Composée en 1896, près de deux ans après la mort de son frère Gustave dont il était très proche, la Messe solennelle de Pâques porte l’empreinte du deuil. Elle résonne aussi comme un hommage à son demi-frère ainé Alfred, prêtre à Notre-Dame-de-Lorette à Paris. L’œuvre y a probablement été créée par Martial lui-même pour les fêtes pascales.
Cette pièce de Caillebotte dévoile un style personnel, avec une originalité très marquée dans l’écriture tant harmonique que contrapuntique. Caillebotte reste très proche du texte de la messe : chaque mot renvoie à un symbole musical et une image religieuse. On y entend également une influence marquée de Wagner avec l’utilisation de leitmotive.
Dans ce disque désormais épuisé (Sisyphe, Abeille Musique), le Chœur régional Vittoria d’Île-de-France donne la version réduite pour chœur, cordes, trompettes, trombones, harpes et orgue, ce dernier remplaçant la petite harmonie. Cet enregistrement, réalisé à l’Eglise Saint-Roch à Paris, est une première collaboration discographique avec l’Orchestre Pasdeloup largement salué par la critique.
CAILLEBOTTE DEUXIEME DISQUE : ECCE QUAM BONUM-PSAUME 132, UNE JOURNEE, DIES IRAE
Le frère oublié sort de l’ombre une deuxième fois après cette première redécouverte de la Messe solennelle de Pâques. Michel Piquemal poursuit son travail musical autour du compositeur et de son répertoire totalement inexploré en compagnie de Benoît Riou, et avec l’aide des descendants de la famille.
En 2014, il enregistre un second disque autour des nouvelles oeuvres de Martial Caillebotte. Pour se faire, il s’entoure de grands noms de la scène française : Karine Deshayes (Victoire de la Musique 2016), Clémentine Margaine (Carmen à l’Opéra de Paris en 2017 aux côtés de Roberto Alagna), ou encore Eric Génovèse (Sociétaire de la Comédie-Française) pour ce nouvel opus mais aussi Philippe Do, Boris Mychajliszyn et l’Orchestre Pasdeloup.
Ce deuxième volume aux Editions Hortus propose cette fois trois pièces musicales, le Psaume 132 – Ecce Quam Bonum, le Dies Irae, et enfin Une Journée, poème symphonique. Ce nouvel opus fait le jour sur l’éclectisme de Martial Caillebotte, son penchant pour la poésie mais aussi le lien indéfectible des trois frères.
Le psaume 132, pour soli, choeur et orchestre est une oeuvre de grande ampleur dépassant en durée la dizaine du minutes et est dédiée « à mon frère l’Abbé A. Caillebotte, curé de Notre-Dame de Lorette », filiation qui, comme on l’a vu, a fortement nourri son oeuvre.
CAILLEBOTTE TROISIEME DISQUE : REEDITION MESSE SOLENNELLE DE PÂQUES
A l’approche de son 30ème anniversaire en 2017, le Chœur régional Vittoria d’Île-de-France et son chef Michel Piquemal donne à nouveau vie à la Messe solennelle de Pâques de Martial Caillebotte, parue initialement en 2013 chez Abeille Musique, et rééditée sous le label des Editions Hortus.
Dans son ancien disque (Sisyphe, Abeille Musique), le Chœur régional Vittoria donne la version réduite pour chœur, cordes, trompettes, trombones, harpes et orgue, ce dernier remplaçant la petite harmonie. Ce nouvel enregistrement conserve celui réalisé à l’Eglise Saint-Roch à Paris, en collaboration discographique avec l’Orchestre Pasdeloup, mais en y ajoutant cette fois la partie de timbales dont la partition a été retrouvée depuis le premier disque. Le livret du disque est repensé pour comprendre la redécouverte de cette œuvre et ce compositeur.
Revivez en image l’enregistrement du premier disque « Messe solennelle de Pâques » de Martial Caillebotte avec des interviews exclusives !